"Le premier, Brueghel a su distendre et différencier les temps à même l'espace, le premier à nous mettre à garde contre la naturalisation mécanique de l'homme en flux, le premier à nous avertir des foules militaires meurtrières. Comment lutter contre l'indifférence vis-à-vis de l'autre, s'interroge-t-il, et en même temps rejoindre la grande collectivité que nous formons sans nous dénaturer ni nous désintégrer. L'homme juste, l'équilibre, voilà le travail d'humaniste auquel le peintre s'applique dans une folle course à la création qui durera dix ans, entre Anvers et Bruxelles. Cela demande, au-delà de la fascination que nous avons pour ses tableaux, ses toiles, la nuance de ses chromatismes, une constante et lente méditation. Penser avec Brueghel, c'est passer par toutes les saisons de la réalité. Circulairement. Révolutionnairement." J. D.
Belleville au tournant des années 1970 est chamboulé. Entre ruines et émergences, le quartier est sens dessus dessous. Les travaux de rénovation offrent un paysage dévasté comme après un séisme ou un bombardement. Les grandes transformations urbaines, amorcées dès les années 1950 pour éradiquer les îlots insalubres et « moderniser » la ville, sont à l’œuvre aux quatre coins de la capitale. Territoire au passé industriel et ouvrier, quartier de fabriques et de petites usines, Belleville a toujours abrité les classes laborieuses et tout un peuple des ateliers. C’est un quartier refuge pour de nombreux migrants qui a su conserver une forte appartenance populaire et dont la renommée a franchi les frontières. François-Xavier Bouchart, alors jeune photographe résidant à Belleville, s’intéresse à cette métamorphose dans les quartiers de Belleville et Ménilmontant. Comme un reporter sur un terrain de ruines, il photographie en urgence les chantiers des démolisseurs, les dernières traces des rues et passages du xixe siècle, les cafés et les commerces, les loges de concierges. Immeubles murés, hôtels meublés et garnis fermés, palissades et terrains vagues entre les HLM en construction où jouent les enfants que le photographe saisit tendrement. En remontant le temps, en remontant Belleville, les auteurs Françoise Morier et Robert Bober disent chacun à leur manière leur attachement à ces images, visages d’une planète à demi disparue.
Au croisement de l’histoire urbaine et de l’histoire des
représentations, cet ouvrage analyse l’évolution de la représentation
audiovisuelle des grands ensembles à partir du milieu des années 1930,
au moment où les prototypes sont construits et filmés, jusqu’au début
des années 1980 quand on envisage leur démolition. L'historienne
Camille Canteux se fonde sur une filmographie impressionnante, d'environ
200 références (cinéma, télévision, films institutionnels du
ministère). Environ 150 photogrammes sont reproduits dans le livre.
De petites boules bleues sont accrochées au feuillage de certains individus et persistent deux ans sur l'arbre. Il s'agit des galbules, ces petits fruits qui contiennent les graines, portés par les arbres femelles. Car cet arbre a également la particularité d'avoir une distinction des sexes. Les individus mâles porteront à leur maturité sexuelle les petits cônes qui contiennent le pollen et les individus femelles les petits cônes qui seront fécondés par le pollen transporté par le vent. Il faut cependant attendre plusieurs dizaines d'années avant d'observer ces cônes mâles et femelles, au minimum trente ans. Mais que représentent trois décennies pour un arbre dont la longévité est de plusieurs centaines d'années?
Pourquoi
s’intéresser à l’art d’accommoder ses cheveux et ses poils ? Comment un sujet
si ténu en apparence peut-il amener à se poser de grandes questions ? Se
fondant sur ses propres enquêtes ethnographiques (en Iran, dans les
pays méditerranéens, à Hokkaido, dans le service de cancérologie d'un
hôpital…) et sur une documentation considérable qui n'ignore aucun
continent ni aucune période de l'histoire, Christian Bromberger raconte
ses diverses rencontres avec les cheveux et les poils. Parce qu'elle se
prête, sans grand risque, aux traitements les plus divers, du rasage au
frisage, de la dissimulation à l'ornementation, la pilosité offre de
singulières propriétés pour symboliser les différences entre les sexes,
entre les statuts sociaux, entre populations voisines ou lointaines mais
aussi entre soumis et insoumis, entre l'ordre du monastère et l'errance
de l'ermite, entre civilisé et le sauvage…
L'opération Les Jardins de la Pirotterie à Rezé – trente maisons en location sociale construites entre 2001 et 2005 – est l'une des expérimentations majeures réalisées dans le domaine du logement en France depuis les années 1990. Le lotissement est composé de six séries, dont chaque maison est différente, réalisées par six architectes ou groupes d'architectes : Emmanuelle Marin et David Trottin, François Jumeau et Louis Paillard, Thierry Lacoste, Jacques Moussafir, Actar, ACC Stalker. Orchestrée par le collectif Périphériques, qui venait de publier un catalogue de maisons d'architectes (1997) adressé au grand public, et contemporaine d'une petite série d'opérations remarquables (Reims, Bordeaux, Mulhouse), elle a bénéficié d'une grande audience médiatique. La réception de ces opérations très en vue et maintes fois publiées est cependant ambiuë. Elles ont parfois suscité une mise à distance de la part des élus, des architectes et des milieux de la recherche. Leur réputation a produit une sorte d'aveuglement alors qu'elles tentaient de répondre différemment à des questions difficiles et têtues. L'ouvrage, issu d'une enquête auprès des habitants et des acteurs du projet, s'efforce de restituer les enjeux de cette opération et l'originalité d'une proposition qui pense l'habiter comme expérience, tend à dé-patrimonialiser la maison et redéfinit le rôle de l'architecte comme opérateur culturel. Ce livre d'enquête est aussi un livre de photographies grâce au regard du photographe Mark Lyon, qui exprime l'originalité de cette architecture dans la simplicité du quotidien.
Photographies de Abdoulaye Barry, Philippe Guionie, André Lejarre, Anissa Michalon, Olivier
Pasquiers, Maurice Weiss
N’Djaména, capitale du Tchad est
montrée ici sous une forme plurielle et subjective. Ce livre témoigne, plus
qu’il ne documente, de situations en s’attachant moins aux traces historiques
qu’à un état des lieux contemporain. Ce n’est pas une monographie de cette
ville anciennement nommée Fort-Lamy mais plutôt une expérience littéraire et
photographique issue de résidences d’artistes produites par l’Institut français
du Tchad.
La diversité des points de vue
constitue une mosaïque de la ville en 2014 que le texte de l’écrivain tchadien
Nimrod éclaire avec force. Le livre propose plusieurs entrées : parcours
dans les quartiers, images de la vie quotidienne, gestes et savoir-faire,
vision insolite de milieux sociaux contrastés, lieux habités, portraits d’habitants
et regard décalé sur les institutions. La richesse et la légitimité de ce livre
reposent sur l’engagement des auteurs, tchadiens et européens, pour tenter de
saisir un peu N’Djaména.
François Le Diascorn rassemble ici une série de photographies réalisées à Paris entre 1971 et 2014. Il s’agit de « son » Paris, parcouru et saisi pendant plus de quarante ans. On retrouve son style particulier, décalé, insolite et humoristique. La soixantaine de photographies en argentique noir et blanc représentent Paris de manière inattendue tout en proposant un diaporama des lieux emblématiques de la ville, de jour comme de nuit.
Ce livre rassemble 58 photographies inédites
provenant d’un fonds découvert en 1980 dans une benne à gravats. Il s’agit de
vues extérieures du Marais réalisées durant l’Occupation, quartier emblématique
de Paris. Paris en son cœur géographique et dans un moment particulier de son
histoire. P. F. Roy, architecte, plasticien et collectionneur, enquête sur ces
tirages : ils proviennent d’une commande officielle passée dès 1941 par la
Ville de Paris et la préfecture de la Seine, sous contrôle de l’occupant
allemand, à des photographes professionnels, Cayeux et Nobécourt. Cette
campagne photographique fixe l’image de ces rues parisiennes, inscrites dans
des îlots déclarés insalubres et promises à la démolition, en vue d’accréditer
la thèse de l’insalubrité.
P. F. Roy invite le lecteur à regarder attentivement les images à travers ses
gloses : décrire, observer, imaginer, dénicher à la loupe des fantômes.
Depuis
150 ans, l’industrie photographique n’a cessé de se développer en lien avec
l’essor de la « civilisation de l’image ». Le geste de « prendre
des photos » est devenu une pratique courante et banale, en apparence
d’une grande simplicité. Pourtant l’acte
photographique est
plus complexe qu’il ne paraît.
Le défi du photographe de 2014 est de maîtriser le
déroulé complet du processus créatif, depuis le choix d’une conception
personnelle de la photographie jusqu’à « l’objet » final que l’on
montrera aux autres (exposition, livre, diaporama…). C’est en partant de ce
constat que Pauline Kasprzak et Jean-Christophe Béchet ont dialogué
autour de quelques grands thèmes photographiques où l’approche philosophique
peut se révéler une aide précieuse.
Dans ce petit livre de 128 pages à 10 euros
sont traitées les questions de l’évolution numérique/argentique, de la matière
photographique, des différentes temps de l’image, du rôle central du matériel,
du moment clé de l’éditing. Les notions de cadrage et de composition, au cœur
de l’acte photographique, sont débattues avec pour fil conducteur les deux axes
primordiaux que sont le « rapport au réel » et la prise en compte du
« hors champ ».
Conçu
sur le principe de l’interview, ce livre se veut autant pratique que théorique
et se décline en courts chapitres : cadrage/composition,avant/après,
l’appareil, l’éditing, la matière, le réel et le marché de l’art.
Dans l'actualité de la commémoration de la libération des camps et de la
fin de la seconde guerre mondiale, ce livre d'art rassemble environ 120
dessins inédits réalisés par Arthur Goldschmidt, père de l'écrivain et
traducteur Georges-Arthur Goldschmidt.
Cet ensemble composé de portraits, scènes de la vie quotidienne,
intérieurs, bâtiments, paysages apporte un éclairage inédit sur le camp
de Theresienstadt.
Le livre propose plusieurs entrées : art, histoire et littérature. En introduction, l’historienne Annette Wieviorka
apporte des éléments d’explication sur le fonctionnement du camp. Les
écrivains Marcel Cohen, Guy Pimienta et Roger-Yves Roche proposent une
approche littéraire des dessins.
Exposition au Centre d'Histoire de la Résistance et de la Déportation de Lyon de mars à juillet 2015
Voici la première vraie synthèse historique sur la création des villes nouvelles françaises. Lieux de mémoire de l'urbanisme des années 1965-1975, les villes nouvelles sont paradoxalement des villes sans histoire. Pourtant elles font l'objet d'enquêtes et d'études depuis plus de cinquante ans. Si la mémoire de ces villes a été forgée dans le temps même de leur création par tous les acteurs (décideurs, aménageurs, habitants et chercheurs), une mise à distance s'imposait. Loïc Vadelorge, historien de ce nouvel objet d'études, questionne ici la césure traditionnelle entre l'époque des grands ensembles et celle des villes nouvelles et montre la filiation réelle et profonde entre différents types de "nouveaux ensembles urbains" tous désignés, à un moment de leur histoire, comme des "villes nouvelles".